Stéphane a été recruté en 2000 comme encadrant technique d’insertion au centre social de la Condition des Soies, à Lyon, avec la création de l’atelier — chantier d’insertion (Lahso reprendra l’activité de cet atelier en 2002). Alors concentré sur les fonctions de redistribution sociale de mobilier d’urgence, l’atelier embrasse maintenant une diversité de métiers. Aujourd’hui chef d’atelier, il nous fait visiter l’atelier menuiserie du Grenier.
Dans son travail d’encadrement, Stéphane nous explique qu’il intervient surtout dans ce qu’il présente comme le début et la fin du processus. C’est à dire qu’il s’occupe de ce qui arrive à l’atelier : les commandes, les devis, les nouvelles recrues aussi, et de ce qui sort : on s’assure que tout est bien comme convenu pour le client. Il est assisté de Richard, encadrant technique d’insertion, pour animer et gérer la vie de l’atelier au quotidien.
Une multiplicité d’activité
La pluri-activité de l’atelier fait qu’on a toujours quelque chose à faire pour quelqu’un, quelque soit son niveau de compétence.
L’activité de base de l’atelier du Grenier, c’est la redistribution sociale de mobilier d’urgence. “Dans les faits, on reçoit une demande de devis par ce que l’on appelle un prescripteur. Ça peut être un assistant social, une structure d’hébergement, ou tout autre interlocuteur que l’on a identifié comme tel. Il permet au bénéficiaire d’accéder au service. À acceptation du devis, l’appel direct du bénéficiaire déclenche la livraison. On peut lui livrer des meubles, (armoire, buffet bas, guéridon, lit,…) et des fournitures parfois (matelas notamment).”
Liée à la redistribution sociale, l’activité de déménagement propose de transporter du mobilier de porte à porte, ainsi qu’une prestation de débarras. Pour cette dernière, un tri est effectué chez le client pour aiguiller ce qui part à la déchetterie et ce qui peut être valorisé suivant le type de meuble et son style. L’équipe de manutentionnaires envoient des photos pour vérification. L’œil du valoriste peut être nécessaire, Stéphane doit parfois être présent pour faire le choix sur le bon produit. Ce qui est gardé est stocké pour être utilisé dans l’atelier, passé en brocante ou dans le circuit de redistribution sociale.
Les productions de l’atelier de menuiserie ébénisterie, suivant les propres mots de Stéphane, “se situent quelque part entre un atelier de création et une menuiserie”. L’atelier réalise des meubles en création ou sur commande en mêlant des meubles de récupération et des composants neufs. Ce savoir-faire singulier amène de plus en plus de clients en agencement. Sollicité par des architectes désireux d’intégrer le réemploi dans leurs aménagements intérieurs, le Grenier a par exemple réalisé le mobilier d’un réfectoire et d’une cuisine à partir notamment de portes issues de la démolition du bâtiment dans lequel se situait ce chantier.

L’atelier, une fonction support de l’insertion
Stéphane nous explique que l’atelier bois du Grenier reçoit de nombreuses candidatures. Les candidats dont le projet professionnel ou les aptitudes sont en correspondance avec les postes disponibles dans l’atelier sont bien entendus privilégiés. Il y a cependant une forme de discrimination positive à l’égard des femmes qui sont moins représentées dans l’atelier.
En ce moment, la moyenne d’âge tourne autour de 30 ans, mais ça dépend des années. Il y a des jeunes en exclusion, qui sont en recherche d’une voie professionnelle, des moins jeunes qui ont eu un parcours professionnel et qui ont décroché,… Cette diversité de situation fait qu’il y a une construction du parcours au cas par cas. En sortie d’un contrat à durée déterminée d’insertion, une formation en agencement & menuiserie complémentaire est possible mais elle rencontre souvent des problèmes de financement. Plus fréquemment, l’immersion dans d’autres entreprises va permettre aux salariés de mettre un pied dans ces activités pour éventuellement les amener à rentrer dans un dispositif d’apprentissage, puis parfois de recrutement.
L’insertion est la priorité de cet atelier. Ses activités sont envisagées comme autant de fonctions supports. Il s’agit pour les personnes accompagnées de retrouver une confiance et de s’orienter. Les missions qu’assurent les collègues de Stéphane, responsables de l’accompagnement socio-professionnel, permettent de mettre en place les priorités hors travail avec la personne accompagnée (logement, santé,…). Ces priorités sont travaillées une par une pour permettre à la personne de retrouver de la stabilité sociale et professionnelle.
Développer le Grenier ?
Stéphane opterait pour une réflexion sur la qualité : “Ce n’est pas ‘plus’, c’est ‘autrement’ ”, concernant les espaces de travail notamment. Il propose d’ailleurs plusieurs solutions pratiques comme par exemple de séparer les espaces de travail par fonction, de leur amener de la transparence pour voir ce qu’il se passe, de donner de la lisibilité pour renforcer l’autonomie des salariés, de séparer les fonctions de magasin et de bureau, …
Ce qu’il soulève également, c’est la nécessité de faire exister un pôle logistique. Force est de constater, chiffres à l’appui, qu’il s’agit aujourd’hui d’une véritable fonction cachée. Elle représente au moins un tiers du chiffre d’affaires (cumul de la redistribution sociale et des services de déménagement ou débarras) et occupe au bas mot la moitié des espaces disponibles du Grenier.
Il propose également de développer des tiers-lieux de commercialisation(partenariats avec des hôtels par exemple). Mais il ajoute : “Ça voudrait dire être en mesure d’augmenter la production, ce que l’on ne peut pas faire aujourd’hui”.
Stéphane semble enfin préoccupé par la visibilité du Grenier. “Les clients potentiels ne savent pas ce que l’on est capable de faire”.
La recherche de solution passe aussi bien par une surface de showroom (vitrine, démonstration) qu’un travail sur l’autre “vitrine”, celle qui n’est pas matérielle : l’image de marque.
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